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Tony Manero : la critique française et la saga d’un pathétique "Travolta" chilien
vendredi 13 février 2009
La presse et la critique française semblent assez unanimes. Tony Manero, le film de Pablo Larrain qui vient de sortir sur les écrans français a de quoi marquer les esprits. Soutenu par la performance exceptionnelle de l’acteur Alfredo Castro, le jeune cinéaste chilien dresse un portrait troublant de ce paumé -Raúl Peralta- qui cherche à se sauver en devenant un autre. Revue de Presse.

Interrogé sur le film, son personnage et l’accueil du public, l’acteur Alfredo Castro commente que là où beaucoup s’attendaient à une comédie sur un pauvre type, Pablo Larrain a fait un film dur et désespéré sur un personnage qui n’a pas d’issue. C’est d’ailleurs pour ça que le film n’a pas plu aux Chiliens. Paradoxalement, c’est pour cette même raison que le film plaît à l’étranger, souligne l’acteur dont la performance a été primée lors du dernier Festival de Turin.
Les premières réactions de la presse française semblent lui donner raison. En voici quelques unes.
TELERAMA
Pierre Murat [1] souligne que Raul est un psychopathe dans un pays de fous. Tony Manero (...) le hante, l’envahit, le possède. Raùl est Tony Manero comme Pinochet est dictateur, avec foi et sans loi conclut Murat. Non sans rappeller qu’Alfredo Castro, parvient à rendre étrangement passionnante, voire troublante, cette coquille vide, cette non-existence.
LES CAHIERS DU CINEMA
Tout en le qualifiant de l’un des films les plus désespérés que la terre ait portés, Hervé Aubron, met en parallèle la Fiévre du samedi soir et ce Tony Manero qui, écho lointain dans le temps et dans la géographie, incarnerait la conformation infernale du Chili de Pinochet, rassemblant dans son corps le peuple qui dort et la police qui tue, la torpeur et le crime.
LE CANARD ENCHAINE
Un fait divers authentique ? Non, répond David Fontaine, la folie obsessionnelle de ce héros impassible répond à la violence froide du régime et à la folie de l’époque. Cette allégorie âpre, remarque Fontaine, est filmée au plus près, "de manière pornographique" dans "la peur et la honte".
LIBERATION
Si, de prime abord, Eric Loret a craint (...) le pensum néoréaliste sud-américain avec plein de pauvres heureux et un pseudo-regard sociétal qui ne dérange personne, il a ensuite senti que cette histoire filmée à l’épaule sous des ampoules de quarante watts, dont les personnages ont plus souvent les bras ballants que levés au ciel, ne sent pas trop bon.
LE MONDE
Pour Isabelle Regnier, Tony Manero crisse comme la craie sur le tableau noir, (...) fait l’effet d’une déflagration. Raul Peralta la fait penser au chauffeur campé par De Niro dans Taxi Driver. Les deux personnages cultivent leur corps avec un narcissisme délirant ; leur folie les conduit à passer à l’acte sans état d’âme, conclut-elle.
STUDIO CINE LIVE
Pour Laurent Djian, Pablo Larrain a cherché à dépeindre un Chili en décomposition, où Pinochet impose sa dictature. Quasi-analphabète, amoral au point de buter une mamie pour une télé, Raùl n’est que le produit de ce pays sans futur. Pelloche crade, décadrages : l’esthétique docu ajoute à la force de ce film toutefois un rien poseur, conclut Djian.
LE NOUVEL OBS
Seul à s’inscrire franchement en faux, Nicolas Schaller se demande : Quentend dénoncer ce film à périr d
ennui sur la fascination dun Chilien minable, tueur à ses heures, pour le danseur campé par John Travolta dans «la Fièvre du samedi soir» ? Seule certitude : il révèle une misanthropie sensible jusque dans l
hermétisme ingrat de sa mise en scène.
[1] Pierre Murat participera, mardi 16 février, au cinéma L’Arlequin, à un debat sur Tony Manero à l’issue de la séance de 19h50