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Élections présidentielles : Le Pérou "entre sida et cancer" ?

mardi 12 avril 2011, par Eduardo Olivares Palma

Qui d’Ollanta Humala ou de Keiko Fujimori deviendra le 5 juin prochain le nouveau président du Pérou ? Pour l’écrivain Mario Vargas Llosa, les péruviens auront à "choisir entre sida et cancer". Lucide ou depité ?

C’est fait. Tel que le laissaient entrevoir la plupart des sondages, c’est Keiko, la fille du très controversé Alberto Fujimori, qui affrontera le 5 juin prochain le non moins controversé Ollanta Humala lors du second tour des élections présidentielles au Pérou. La candidate de Fuerza 2011 a obtenu 23, 2% des voix, devançant nettement le candidat de l’Alianza por el gran cambio, Pedro Pablo Kuczynski relégué à la troisième place avec 19,3 % des voix. Premier des 11 candidats présents lors du premier tour, Ollanta Humala obtient quant à lui 31,2% des voix.

Comme chacun sait, Humala n’en est pas à son coup d’essai. En 2006 il était déjà arrivé en tête avec plus de 30% des voix avant d’être battu au second tour par l’actuel président, Alan Garcia. Considéré généralement comme un "militaire de gauche", il a été souvent assimilé au président vénézuelien Hugo Chávez. Cependant, ces derniers temps il a pris soin de se démarquer explicitement du leader vénézuelien qui l’a qualifié récemment de "bon soldat". "Je n’ai pas besoin qu’on me dise si je suis un bon soldat ou pas" a répondu sèchement Humala, tout en demandant à Chavez de se tenir à l’écart du processus électoral péruvien.

Réelle prise de distance ou manoeuvre destinée à rassurer l’électorat centriste qui déteste Chavez et dont il aura grand besoin pour ne pas répéter la défaite de 2006 ?

Au nom du père

Fille de l’ancien président déchu Alberto Fujimori, Keiko Fujimori a fait toute sa carrière à l’ombre de son père dont elle devint même la "première dame" après le départ fracassant de l’ancienne madame Fujimori, Susana Higuchi, qui accusait son président d’ex mari de mauvais traitements et même de...tortures.

En 2000, suite à la fuite de son père vers le Japon où il cherchait à échapper à la justice péruvienne, Keiko prit la tête des orphelins du "chinito" et devint en 2006 député de Lima. Elle obtint alors la plus grande votation jamais obtenue par un candidat au parlement dans toute l’histoire du Pérou. Cette fois-ci, le fait d’être l’héritière politique de celui que la justice péruvienne a condamné à plus de 30 ans de prison pour "assassinats avec préméditation, séquestration aggravée, blessures graves, détournement de fonds publics et enrichissement crapuleux", n’a pas été un obstacle pour qu’elle accède au second tour de l’élection présidentielle.

"Ils me font penser au couple que forment Marine Le Pen et son père", commente un Français ayant vécu longtemps au Pérou.

Le Pérou entre sida et cancer ?

C’est le prix Nobel de littérature Mario Vargas Llosa, grand écrivain mais piètre homme politique, qui a déclaré un jour qu’un deuxième tour entre Humala et la fille Fujimori reviendrait à "avoir à choisir entre le Sida et le cancer". Plus récemment, dans une interview au journal espagnol La Vanguardia, il a soutenu que "le Pérou à deux possibilités : le suicide ou le miracle".

Ancien candidat malheureux à la présidence de la république - il a été vaincu en 1990 par Alberto Fujimori- Vargas Llosa a soutenu cette fois-ci l’ancien président Alejandro Toledo, qui n’a obtenu que la quatrième place lors de ce premier tour. Mais il trouvait tout aussi souhaitable une éventuelle victoire de Pedro Pablo Kuczysnki. Double déception.

En effet, les péruviens ont - une nouvelle fois ! - décidé qu’ils se passeraient de son avis et que le 5 juin prochain choisiront d’entre Humala et Keiko, le successuer d’Alain Garcia.. Que fera alors Monsieur le Marquis ? [1]


[1Le 3 février dernier le Roi d’Espagne lui a conféré le titre de Marquis de Vargas Llosa pour "sa contribution à la littérature et à la langue espagnole"