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Elections au Chili : un homme de droite à la place d’une femme de gauche ?

jeudi 26 novembre 2009, par Eduardo Olivares Palma

Le 13 décembre prochain les Chiliens sont appelés à choisir le successeur de la socialiste Michelle Bachelet. La première femme à occuper le présidence chilienne passera-t-elle le pouvoir à un homme de droite ? À l’invitation de La Francolatina, Georges Couffignal (IHEAL), Gérard Thomas (Libération) et Ricardo Parvex (AEPPCH) en débattront jeudi 3 décembre à la Maison de l’Amérique Latine (*).

Est-ce donc la fin de la coalition de centre gauche qui après avoir réussi à déloger le régime militaire a géré le Chili pendant deux décennies ? Telle semble l’hypothèse la plus probable si l’on s’en tient aux sondages qui depuis des mois voient caracoler en tête le candidat de l’opposition de droite Sebastian Piñera.

Bien que la présidente Michelle Bachelet enregistre un soutien exceptionnel -82% de ses compatriotes se disent satisfaits de son action- son « poulain », l’ex-président Eduardo Frei, n’en bénéficie guère. Les derniers sondages le situent systématiquement autour de 25% des intentions des voix lors du premier tour.

Il est d’ailleurs talonné de près par l’un des deux candidats ayant rompu avec la majorité présidentielle, Marco Enriquez Ominami, crédité de 20% des voix aux premier tour. Le deuxième dissident de la majorité présidentielle, le candidat de la gauche Jorge Arrate, obtiendrait un 7% des voix.

Paradoxes et inconnues d’un scrutin (probablement) historique

Historique, ce scrutin pourrait l’être à plus d’un titre. En effet, si Sebastián Piñera l’emporte, ce sera la première fois depuis plus d’un demi-siècle que la droite réussit à installer l’un des siens à La Moneda sans passer par la case coup d’état. Jorge Alessandri (1958-1964), fut le dernier président de droite à être élu démocratiquement.

Tout aussi historique serait, de l’avis de nombreux observateurs, l’éventuelle défaite de la coalition qui gouverne le Chili depuis mars 1990. Née à la fin des années 80 pour mieux rassembler les anti-Pinochet, la Concertation Démocratique aura réussi à mettre fin

au régime militaire et à conduire le Chili pendant 20 ans avec des succès qui, parmi d’autres, expliquent le fait que la présidente chilienne vient d’être reconnue comme le troisième chef d’état le mieux noté des Amériques.

Cependant, des nombreuses failles restent présentes dans ce que Eduardo Frei lui-même appelait la « démocratie imparfaite » du Chili. Parmi les imperfections : le système politique hérité de la dictature, quelques dossiers toujours ouverts en matière d’atteintes aux droits de l’homme, l’absence d’une solution durable aux revendications du peuple mapuche et la concentration toujours démesurée de la richesse.

A cela il convient d’ajouter probablement l’usure du pouvoir au terme de deux décennies de gouvernement, la « vampirisation » des partis de la majorité présidentielle

par les équipes installés à La Moneda et la perte constante de légitimité et d’autorité de la vieille "nomenklatura" de la Concertation. Un phénomène qui, entre autres, explique le fait que deux des trois candidats qui menacent la continuité de la majorité actuelle, Marcos Enriquez Ominami et Jorge Arrate, sont des anciens de la Concertation.

Ces derniers jours une sorte de « sainte alliance » contre la candidat de droite semble se dessiner avant même le premier tour du 13 décembre prochain. Proposée par le candidat de la gauche, cette sorte de « pacte républicain » à la chilienne risque de devoir attendre les résultats du premier tour. En effet, plus on avance

vers le vote, plus la distance semble se raccourcir entre Frei et le jeune Enriquez Ominami. Ni l’un ni l’autre semblent donc prêts à se faire de cadeau. Même pas au nom du « tous contre la droite » que la plupart dit vouloir assurer.

Un attentisme aggravé par le fait que plusieurs sondages indiquent que c’est Marcos Enriquez Ominami qui aurait le plus de chances battre le candidate la droite au second tour. Comble des paradoxes : les mêmes sondages lui donnent peu de chances de figurer au second tour. Mieux encore, à la question "compte non tenu de vos préférences, qui sera selon vous le prochain président du Chili ?" la réponse des sondés était, fin octobre : Piñera 53%, Frei 26%, Enriquez Ominami 8%.

Alea jacta est ?